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Léonard de Vinci à l’ambassade d’Italie par Elena Iakounine

Cinq siècles très exactement ont passé depuis le moment où Léonard de Vinci franchissait les Alpes pour se rendre en France, auprès de son protecteur François Ier. C’est en effet en 1516 que le roi de France conviait le maître italien à le rejoindre en son château d’Amboise, en qualité de peintre de cour, d’architecte et d’ingénieur.
500 ans plus tard, les diplomates italiens de la capitale commémorent l’événement au travers d’une exposition. Ils ont tenu à attirer l’attention des Français et des touristes sur cette date, qui marque véritablement un tournant dans les relations franco-italiennes, notamment en matière culturelle et artistique. L’exposition prend place au sein même de l’ambassade d’Italie en France, qui siège par ailleurs dans l’un des hôtels particuliers les plus luxueux de Paris.

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Cette exposition ne présente en fait qu’une seule œuvre signée Léonard de Vinci, mais quelle œuvre! Il s’agit de la très énigmatique Scapigliata, habituellement conservée à la Galerie nationale de Parme. Ce dessin sur bois est depuis sa création nimbé de mystère.

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Il a été réalisé non pas à la mine de plomb ou au fusain, mais au moyen d’un pigment, jusqu’à présent non identifié. On s’interroge aussi quant à sa fonction. Est-ce une étude préparatoire au tableau à jamais perdu Léda et le Cygne ? Ou bien faut-il y voir le portrait de Sainte Anne ? Les deux propositions sont certes recevables, mais n’expliquent de toute manière en rien le choix du support : pourquoi avoir préféré ici le bois au papier ? Et s’il s’agit bien d’un travail préparatoire, pourquoi donc l’avoir enduit de vernis, comme dans un souci de le protéger des aléas du temps ? C’est d’ailleurs grâce à ce revêtement que La Scapigliata peut être exposée de manière permanente au musée de Parme. En effet, les dessins disons plus traditionnels, exécutés eux à la mine de plomb, ne peuvent être exposés plus de trois mois d’affilée, en raison de leur trop grande fragilité. Ils sont en effet bien trop sensibles aux facteurs environnementaux tels que la lumière, l’humidité ou encore les vibrations.
En définitive, l’exposition se compose pour l’essentiel des tableaux réalisés par les élèves de Léonard de Vinci, dont certains l’avaient accompagné à la cour de France.

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Cette exposition nous présente justement une copie du tableau perdu de Léonard de Vinci, Léda et le Cygne.
Cette reproduction est due au travail de Francesco Melzi, et elle est habituellement conservée à la Galerie des Offices de Florence. Cette œuvre, bien que n’étant pas de la main du maître, nous offre tout de même une représentation très fidèle de ce qu’était la version de Léonard de Vinci.

Trois tableaux du génie italien, actuellement conservés au Louvre, ont été amenés par le maître lui-même lors de son arrivée en France. Il s’agit ni plus ni moins de La Joconde, de La Vierge à l’Enfant avec sainte Anne, et du Saint Jean Baptiste.

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Trois copies de ce dernier ornent actuellement les murs de l’ambassade d’Italie de Paris. Deux nous viennent de Naples, et la troisième de la Pinacothèque de Milan. L’intérêt de ces toiles réside essentiellement dans leur processus d’exécution. Ces trois reproductions sont extraordinaires car elles n’ont pas été réalisées, comme à l’accoutumée, d’après l’œuvre achevée du maître. Dans ce cas précis, les élèves ont travaillé aux côtés de Léonard de Vinci, qui peaufinait donc encore son projet. Ces copies sont en ce sens uniques, car elles donnent à voir la gestation même de l’œuvre, avec tous les tâtonnements que cela comporte. Ici, on remarque que Léonard de Vinci a principalement hésité quant à la manière de représenter l’index du saint, pointé mystérieusement en direction du ciel. Les copies et la version originale divergent en ce sens radicalement. La restauration de l’original, menée dernièrement au Louvre, a elle confirmé que le maître a modifié son projet initial bien après la réalisation des copies. Les élèves ont donc reproduit avec fidélité l’œuvre alors en cours du maître, mais celui-ci changea plus tard son intention première, et modifia donc son tableau.
Il convient de se rendre à l’ambassade d’Italie ne serait-ce que pour apprécier l’ingéniosité avec laquelle ont été agencées les toiles. L’exposition se développe en effet dans un espace absolument pas approprié à ce genre d’activités, et le résultat obtenu en est d’autant plus remarquable.

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Rappelons que l’ambassade d’Italie siège en fait dans l’hôtel particulier de La Rochefoucauld, édifié lui en 1732. Le gouvernement français transmet ce bâtiment à l’ambassade d’Italie en 1937, dans le cadre d’un bail à long terme, et en échange du palais Farnèse de Rome, qui accueille alors l’ambassade de France en Italie.

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En fait, les Italiens eurent le choix entre cet hôtel particulier et le palais Matignon, qui se trouve lui aussi rue de Varenne, et qui est aujourd’hui la résidence officielle et le lieu de travail du Premier ministre.

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Si étonnant que cela puisse paraître, les Italiens choisirent en ce temps-là l’hôtel de La Rochefoucauld.
L’exposition est à voir jusqu’au 20 novembre, tous les jours de 11h à 17h. Notez que l’entrée est gratuite. Pour rappel, voici l’adresse de l’ambassade d’Italie : 47 rue de Varenne, Paris, 75007.

Photos: Henri Martin

Elena Iakounine, traduction de Isabelle Claus

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