ANTIGONE *
Récemment, il nous avait été donné de voir une belle version, plutôt classique, en arabe par Le Théâtre National Palestinien de cette tragédie antique « Antigone » de Sophocle.
Aujourd’hui au Théâtre National de Chaillot, c’est une version en italien toute autre, certes inspirée du mythe originel mais, totalement ancrée dans la modernité. Ecrite par une femme de lettres et dramaturge italienne Valeria Parrella, cette pièce est mise en scène avec maestria par Luca De Fusco, créateur à succès et inlassable cherchant ! Les émotions nous submergent tant il est question de nous: les débats sociétaux actuels sur l’euthanasie, l’enfermement de l’être humain dans le processus quasiment irréversible d’une fin de vie, l’enfermement et la promiscuité dans une cellule de prison…c’est là que se contredisent les lois de la Cité et celles qui viennent du Cœur. A l’instar de la loi qui interdisait l’héroïne grecque d’enterrer son frère, l’adaptatrice Valeria Parrella aborde ces sujets de société en posant la problématique fondamentale: il y a la Loi de la Cité et, il y a la Loi du Cœur, celle qui doit considérer avant tout l’Esprit de la Loi.
D’emblée, Antigone s’offre à nous, en gros plan, pour s’emparer du texte dans un français impeccable où l’accent est à peine perceptible et, le prenant à bras le corps, elle nous révèle une véritable leçon de théâtre dans toute la splendeur de l’Art Oratoire. Un texte fort, ciselé, précis toujours en résonance avec le jeu des acteurs.
Ce spectacle d’une beauté époustouflante est singulière par sa mise en scène en demi teinte où les comédiens entre ombre et pénombre, entre champs et contre-champs se répondent, empreints d’un mystère indicible où l’angoisse et la souffrance révèlent notre finitude…Ici, tout concourt à la réussite d’un spectacle innovant, tout concourt à donner une intensité dramatique au texte et aux images : la musique, la scénographie, les jeux de lumière et des comédiens en harmonie.
Gaïa Aprea, une Antigone superbement inspirée dans son combat, remarquable dans sa force et sa fragilité. Du lever de rideau, où elle nous apparaît émouvante, comme un être fait de chair et de sang, au final où, après son suicide, elle nous quitte, évanescente dans sa robe rouge, symbole de l’amour sanctificateur dans la Grèce antique, cette Antigone-là restera dans la mémoire collective, celle d’un être qui s’envole lentement pour l’Eternité.
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* Théâtre National de Chaillot 1, place du Trocadéro 75016 Paris / 01 53 65 30 00.
Jusqu’au 28 novembre 2013 et….,
à suivre absolument dans d’autres programmations