1944-2014: « Sous les obus, les plages… », la Normandie au coeur du tourisme de mémoire !
A l’occasion du 70ème anniversaire du Débarquement, la Normandie s’apprête à être le théâtre d’une célébration planétaire : la commémoration de la plus grande opération militaire de toute l’histoire. Les premiers pas de la Libération de l’Europe. Entre les 5 et 7 juin prochains, pas moins de 19 chefs d’Etat et de gouvernements étrangers vont participer à 21 cérémonies réparties sur les 3 départements de Basse-Normandie, du Calvados et de la Manche. Outre Barack Obama, Vladimir Poutine et Angela Merkel, François Hollande accueillera les reines Elisabeth d’Angleterre, Margrethe II du Danemark et le roi Harald de Norvège.
200.000 visiteurs sont attendus sur une bande de 80 kms de long et une vingtaine de large. Avec comme point d’orgue, le 6 juin, le D-Day, le jour J, le jour le plus long, la commémoration du Débarquement et du début de la bataille de Normandie. François Hollande sera au Memorial de Caen, la Cathédrale de Bayeux accueillera la reine Elisabeth, au même moment Barack Obama s’inclinera au cimetière américain de Colleville sur Mer.
La reine Margrethe II du Danemark se rendra au Musée du Débarquement de Utah Beach à Sainte-Marie-du-Mont (Manche) et participera à une cérémonie bilatérale au Monument danois
« Ce n’est pas forcément très connu, explique le maire de Sainte-Marie-du-Mont, mais plusieurs marins danois ont combattu à Utah Beach. C’est d’ailleurs là que se trouve le seul monument français qui est leur est dédié ! » Au début de l’occupation, 245 navires et 6 300 marins danois se trouvaient hors du territoire danois. 145 de ces navires passèrent sous commandement britannique et combattirent avec les flottes alliées. Durant la guerre, plus de 1 000 marins danois ont perdu la vie. « Par ailleurs, près de 1 000 soldats danois de l’armée de terre rejoignirent les troupes alliées. Parmi ceux-ci des parachutistes danois prirent part aux opérations ommando lors du débarquement et ont été parachuté derrière les lignes ennemies.S’agissant des forces aériennes, la Royal Air Force accueillit en son sein une centaine d’aviateurs danois. Une partie d’entre eux participa aux opérations aériennes du 6 juin 1944. Le 6 juin 1944, 31 navires danois parmi lesquelles 24 sous pavillon danois participèrent au débarquement, sous commandement britannique. 800 marins danois furent ainsi engagés lors du débarquement. Leur action justifia l’inauguration en 1984 par S.A.R. Le Prince Consort Henrik de Danemark d’un monument à Saint-Marie-du-Mont dédié à la mémoire des marins danois ayant participé à l’opération Neptune« . Quand au Roi de Norvège S.M. Harald V, il sera accompagné par son Premier ministre Erna Solberg, ainsi que de la ministre de la Défense Marie Søreide Eriksen et du chef d’Etat-Major des armées Haakon Bruun-Hanssen pour assister à la cérémonie binationale franco-norvégienne, à Hermanville sur Mer (Calvados) suivie d’une démonstration de la garde royale norvégienne et du fameux quadrille norvégien.
« Un monument « Le Matelot » » a été érigé à Hermanville-sur-Mer, en hommage aux 34 marins norvégiens qui ont été les premiers morts précédant la phase de Débarquement du 6 juin 1944. Leur Destroyer, le Svenner, fut torpillé alors qu’il assurait la protection des navires transportant les troupes qui devaient débarquer à Hermanville-sur-mer. Son ancre, repêchée récemment sur nos côtes par la marine norvégienne, a d’ailleurs été placée au pied du monument.
La présence du « Matelot » sur les côtes normandes, est d’autant plus importante aux yeux de la municipalité d’Hermanville-sur-mer, que la Norvège, comme beaucoup d’autres pays (Pologne, Luxembourg, Grèce, Tchécoslovaquie…) a souvent été oubliée de l’Histoire du Débarquement en Normandie, alors qu’ils ont participé activement aux combats maritimes, terrestres ou aériens et ont permis que la France et ensuite l’Europe soit libérées. Ainsi c’est avec une immense émotion que la commune a accueilli, pour l’inauguration du monument, le 7 juin 2004, sa Majesté le Roi de Norvège Harald V, accompagné de 150 vétérans norvégiens et de la Musique de la Garde Royale. »
L’œuvre originale « Le Matelot » de l’artiste norvégien Per Palle Storme est installée quand à elle à Oslo.
Tous les chefs d’État se retrouveront pour un déjeuner de gala sous les ors du monumental château de Benouville (on se souviendra que la prise de contrôle du pont de la ville, le Pegasus Bridge – pont Pégase du nom du cheval ailé emblème des parachustistes britanniques- situé sur le canal qui lie Caen à la mer, fut un des faits majeurs de l’Operation militaireOverlord) avant qu’ils ne partent en convoi officiel , à 8kms de là, vers la plage de Sword Beach, à Ouistreham, pour la grande cérémonie internationale.
Pendant ce temps-là, le 6 juin, retranché sur ses terres, un petit royaume nordique, le royaume de Suède, poursuivant, depuis 200 ans sa politique de neutralité (avec les influences qui sont les siennes !) célèbrera sa journée des drapeaux et sa fête nationale, à Skansen, son Musee en plein air.
« Pendant très longtemps, la Suède a été un des rares pays au monde à ne pas avoir de fête nationale. Mais à la fin du siècle dernier, de nombreuses voix se sont élevées pour remédier à la situation. La date du 6 juin a été choisie pour deux raisons:
– le 6 juin 1523, l’accession au trône de Gustav vasa qui mit fin à la domination danoise.
– le 6 juin 1809, la Suède s’est dotée d’une nouvelle constitution établissant les droits et libertés du citoyen. Constitution, qui d’ailleurs n’a été modifiée qu’en 1974.
Mais ce n’est qu’en 1983 que le 6 juin a pris rang de fête nationale Et qu’en 2005 qu’ell e est devenue un jour férié. Mais sans aucune célébration ou liesse particulière« .
Une chose est sûre la Suède comme le Portugal, l’Espagne, la Turquie, la Suisse, l’Irlande, autres pays neutres, ne sera pas représentée lors de ces cérémonies en Normandie.
Les Plus du Jour J en Normandie
Mais les Suédois connaissent bien la région et la Normandie a depuis le Xe siècle des relations particulières et privilégiées avec la Scandinavie. Ce « voisinage » historique s’est renforcé au XXe siècle, après la Seconde Guerre mondiale, avec la reconstruction de Caen et l’envoi par la Suède, de plus de 200 maisons en bois, entre 1946 et 1948. Ces maisons jumelées ont représenté près de 400 logements répartis sur dix communes du Calvados : Thury-Harcourt, Mézidon, Saint-André-sur -Orne, Lisieux, Fleury-sur-Orne, Aunay-sur-Odon, Condé-sur-Noireau, Bretteville-sur-Laize, Colombelles et Caen, bien évidemment.
« Parallèlement, l’Université de Caen a créé, il y a 55 ans, un département d’études nordiques unique en France : on y enseigne les trois langues scandinaves ainsi que le finnois et l’islandais. Ses enseignants sont aujourd’hui les principaux traducteurs de la littérature nordique. C’est à Caen que le dictionnaire franco-islandais a été réalisé et que sont traduits la plupart des polars scandinaves en vogue ces dernières années… . » : Jérome Rémy, directeur des Boréales de Caen, festival dédié à la culture nordique.
Néanmoins si vous venez en Normandie cette année, vous ne pouvez pas manquer quelques uns de la trentaine de sites, monuments, mémoriaux et musées célébrant le Jour J et la Deuxième guerre mondiale.
Le plus imposant de tous, le Mémorial de Caen, la Cité de l’Histoire pour la Paix. Musée inauguré en 1988, consacré à l’histoire du 20è siècle et situé à Caen, capitale régionale de la Normandie, proche des plages du débarquement et ville détruite à 85% par les bombardements alliés au mois de juin 1944.
C’est le musée de province le plus visité avec ses 400.000 visiteurs par an. En 2002, le musée s’est agrandi avec l’ouverture d’une nouvelle aile principalement consacrée aux cultures de paix et à la Guerre froide. Les deux parcours muséographiques réunis permettent de couvrir les années 1918 à 1989, du Traité de Versailles à la chute du mur de Berlin.
En 2009 et 2010, le Mémorial de Caen a encore rénové ses parcours et ouvert de nouveaux espaces de visite : « Guerre mondiale, Guerre totale » et « Le Débarquement et la Bataille de Normandie ». Récemment inauguré, le bunker souterrain du poste de commandement allemand du Général Richter, à travers une scénographie inventive qui met en lumière les aspects militaires de l’occupation allemande ainsi que l’histoire du Mur de l’Atlantique.
www.memorial-caen.fr
L’Historique Arromanches
La plage d’Arromanches est restée célèbre comme lieu historique du débarquement, notamment pour le port artificiel qui y fut installé.
C’est sur la plage d’Arromanches que les Alliés établirent un port artificiel provisoire afin de permettre le débarquement de matériel lourd, sans attendre la conquête de ports en eaux profondes, tels que le Havre ou Cherbourg. Bien qu’au centre de la zone de débarquement, Arromanches fut épargné par le gros des combats le Jour J. Afin de permettre l’installation du port et son bon fonctionnement le plus rapidement possible, il ne fallait pas abimer la plage et détruire les voies de communications aux alentours. Le port fut mis en service le 14 juin et permit de débarquer 9.000 tonnes de matériel par jour..
Ce lieu fut en effet choisi afin d’y établir les structures portuaires indispensables au déchargement des quantités de ravitaillement nécessaires aux troupes d’invasion lors du débarquement de juin 1944. Les Britanniques construisirent d’énormes caissons flottants en béton, les « Phoenix » qui après avoir été remorqués d’Angleterre devaient être assemblés en les coulant afin de former des quais et des jetées, formant et délimitant un port artificiel, comprenant des pontons reliés à la terre par de véritables chaussées flottantes. Aujourd’hui encore, quelques caissons « Phoenix » sont visibles et témoignent de la solidité des constructions..
« Quelques chiffres : le 12 juin 1944, plus de 300 000 hommes, 54 000 véhicules, 104 000 tonnes de ravitaillement avaient été débarqués. Pendant les 100 jours de fonctionnement du port, ont été débarqués : 2,5 millions d’hommes, 500 000 véhicules, 4 millions de tonnes de matériel. La meilleure performance du port se situe dans la dernière semaine de juillet 1944, au cours de ces sept jours, le trafic d’Arromanches dépassa 136 000 tonnes, soit 20 000 tonnes par jour ».
Le Musée du Débarquement d’Arromanches avec ses maquettes révélant le côté technique des ports construits est un musée thématique ayant pour but de comprendre la construction et le fonctionnement du port artificiel d’Arromanches, le tout replacé dans l’ensemble du Débarquement. Ce musée, placé face aux vestiges du port, propose des visites guidées et des audiovisuels relatant les évènements de la nuit du 5 au 6 juin.
Arromanches 360 est une salle de cinéma circulaire située sur les hauteurs d’Arromanches face aux vestiges d’un des ports.. Elle projette en boucle un film de 20mn sur Les 100 jours de la Bataille de Normandie. Réalisé par les auteurs de la série événement Apocalypse, ce film projeté en haute définition, sur 9 écrans, raconte grâce à des images d’archives venues du monde entier, l’intégralité des opérations militaires.
www.musee-arromanches.fr
Le grand témoin du Mur allemand de l’Atlantique
La Batterie allemande de Longues-sur-Mer dans le Calvados, renforcée en toute hâte par le maréchal Rommel, seule batterie de défense côtière classée « Monument historique » au cœur des plages du Débarquement.
Ouvrage majeur du Mur de l’Atlantique, située au sommet d’une falaise dominant la Manche entre Arromanches et Omaha Beach, elle offre aujourd’hui une vue panoramique sur les plages et reste la seule batterie qui soit encore équipée de ses canons d’époque. Le poste de direction de tir de la batterie de Longues-sur-Mer, ainsi que les 4 batteries avoisinantes ont servi de décor à l’une des scènes du film Le Jour le plus long.
La batterie de Longues est le témoin fidèle de ce que pouvait représenter, par son importance, un ouvrage du mur de l’Atlantique. De nos jours, l’intérêt de cette batterie est dû au bon état de ses bunkers et au fait qu’elle conserve deux de ses pièces de 150 mm d’origine. Le site est aménagé pour la visite.
L’émotion: les Cimetières militaires
Près de 100.000 soldats (environ 40.000 Alliés et 60.000 Allemands) sont morts en Normandie au cours des combats de l’été 1944. Une partie d’entre eux (essentiellement 85% des Américains) a été rapatriée dans leurs pays d’origine. Mais la très grande majorité a été inhumée en terre normande,dans 27 cimetières : 16 britanniques, 2 canadiens, 2 américains, 1 polonais, 1 français et 5 allemands.
Le cimetière américain de Colleville-sur-Mer dans le Calvados, situé juste au-dessus de la plage d’Omaha Beach, tristement appelée Red Easy, Easy la Sanglante, parce que la plus meurtrière. Inauguré officiellement en 1956 avec son mémorial, ce cimetière honore les 9387 soldats américains morts pendant cette bataille de Normandie. Le cimetière accueille environ 1 million de visiteurs par an et est le cimetière américain le plus visité. Les États-Unis y ont investi 30 millions de dollars pour retracer le débarquement. Dans une des salles, une bande-son cite en permanence le nom des soldats américains morts au combat.
www.abmc.com
Pas très loin de là, à La Cambe (Calvados) le Cimetière militaire allemand, est un lieu impressionnant qui réunit 21.300 tombes. Un centre d’accueil, un espace d’exposition permanente à la mémoire des soldats allemands ainsi qu’un jardin planté de 1200 érables, symboles vivants de la paix entre les nations, sont à la disposition des visiteurs.
www.volksbund.de
L’Unique, le Musée Airborne
Situé dans le département de la Manche, le Musée Airborne est implanté depuis 1964, au centre du bourg de Sainte-Mère-Eglise, le premier village à avoir été libéré le 6 juin, devenue célèbre de par le monde grâce à son parachutiste John Steele resté accroché à son clocher. Ce musée vous entraîne au cœur de l’extraordinaire épopée des parachutistes américains des 82ème et 101ème divisions aéroportées qui sautèrent sur la Normandie lors de l’opération Neptune dans la nuit du 6 juin 1944.
Grâce au planeur Waco et au Douglas C-47, c’est un voyage unique dans l’espace et le temps qui est proposé à tous les visiteurs et autres passionnés parcourant ce lieu historique.
En 50 ans d’existence, le Musée Airborne est devenu le plus grand musée d’Europe consacré aux parachutistes américains des 82ème et 101ème divisions aéroportées engagés en Normandie dans le cadre de l’Opération Overlord de Juin 1944.
Le 1er mai 2014, 50 ans après son inauguration, le Musée Airborne s’est agrandi et propose, dans un nouveau bâtiment de 900m2 en forme d’aile d’avion, appelé « Opération Nepturne » un parcours de visite novateur, exceptionnel et riche en émotions. Ce parcours chronologique évoque en différentes séquences ce que vécurent les parachutistes depuis leur embarquement en Angleterre dans la nuit du 5 au 6 juin 1944. Ce parcours alterne des sas ayant vocation à donner les clefs de la compréhension des événements et des salles immersives qui plongent le visiteur au cœur de l’action. Tout au long de ce parcours, le visiteur accompagne John, un parachutiste radio de la 82ème. Les enfants ont leur propre parcours avec une mascotte qui les guide et des textes adaptés. Ils embarquent dans l’avion et découvreent la cabine de pilotage puis les parachutistes assis sur un côté prêts à sauter au-dessus de la Normandie. Le bruit est assourdissant. Les détonations et les moteurs font vibrer les parois et le plancher. …
En quittant le Musée Airborne, il nous reste le souvenir de ces heures tragiques qui firent rentrer Sainte-Mère-Eglise, son église et ses environs, dans l’Histoire.
http://www.airborne-museum.org/
Si vous ne venez pas en Normandie cette année, vous pourrez toujours vous faire une idée de ce qui s’est passé, il y a 70 ans, en allant voir ou revoir la version restaurée (sortie 11 juin) du classique « Le Jour le plus Long » de Darryl Zanuck avec John Wayne, henri Fonda, Robert Mitchum, Richard Burton, Bourvil,Jean-Louis Barrault, Arletty… ou bien encore le film aux 5 oscars de Steven Spielberg « Il faut sauver le soldat Ryan », avec Tom Hanks et Matt Damon, lesquels malgré quelques maladresses et inexactitudes sont d’un extrême réalisme.
Enfin, puis vous pourrez venir /revenir en Normandie un peu plus tard, l’année prochaine pour ses belles vaches normandes, son beurre, ses crèmes et ses fameux fromages: Camembert, Neufchâtel, Pont-L’Evêque et Livarot…; pour ses pommiers et ses produits dérivés, cidre et Calvados; pour son bocage et ses fameux paysages qui ont inspiré les peintres impressionnistes; pour ses églises du XIè siècle et ses grandes fermes aux hauts murs aveugles; enfin pour ses falaises escarpées surplomblant la mer et ses plages de sables et de coquillages… placées, pour l’éternité, sous le double signe de la mémoire et de l’émotion.
Par Daniel Dray
Sites dédiés: www.le70e-normandie.fr
www.calvados-tourisme.com