Exposition : Georgette Agutte, une artiste d’avant-garde, trop méconnue…
EXPOSITION * *
Georgette Agutte, une artiste d’avant-garde, trop méconnue…
… et pourtant contemporaine de Cézanne, Auguste Renoir, Gustave Moreau, … Elle fut l’élève en sculpture de Louis Schroeder et en peinture de Gustave Moreau. Artiste, pour le moins non-conformiste, elle divorce pour épouser Marcel Sembat. Ensemble, ils fréquenteront les plus grands artistes de leur époque : Signac, Odilon Redon, Rouault, et plus particulièrement Claude Monet et Henri Matisse.
Pour la première fois, Georgette Agutte ( 1867-1922) expose au Salon des Indépendants de 1904, aux côtés de Paul Gaugin, Henri de Toulouse-Lautrec, Camille Pissaro, etc… En 1907, elle expose au Salon d’Automne avec le mouvement Nabis initié par Paul Sérusier, Pierre Bonnard et la vague des impressionnistes et fauvistes dont Matisse, Vlaminck, Derain, Braque, … C’est dire combien les œuvres de Georgette Agutte ont été connues et reconnues comme faisant partie intégrante de ces mouvements artistiques initiés par les jeunes talents de l’époque, qualifiés par le très influent critique d’art Louis Vauxcelles de « oseurs, outranciers, incohérents, sauvages », qui exposaient dans la salle VII, baptisée « la cage aux fauves » ! C’est, plus tard au Salon d’Automne de 1912 que Georgette. Agutte fait merveille en présentant « Mitsouko à sa toilette », une œuvre magnifiquement audacieuse inspirée des Arts Extrêmes Orientaux. Cette œuvre, à l’entrée de l’exposition actuelle, est une invite à une ambiance que l’on devine particulière et, à un parcours riche en créations, recherches et influences artistiques multiples, animées forcément par la passion de l’Art. Dans des vitrines, on découvre des objets divers, des souvenirs photographiques, une lettre de Matisse adressée à Georgette Agutte, une lettre de celle-ci adressée à son « Cher Maître » Claude Monet, … Sur les murs, des gouaches aux couleurs douces et subtiles, des huiles sur toile d’une composition architecturale remarquable ; par exemple « Le remorqueur sous le pont de Bennecourt », oeuvre toute en transparence et luminosité, aux couleurs pures teintées d’un pointillisme délicat; une huile sur bois, inspirée par la nature, dans une complémentarité audacieuse de couleurs, d’une beauté sauvage et ordonnancée à la fois, au titre évocateur « Le jardin fauve de Marcel Sembat ». Et, sans cesse audacieuse et novatrice dans son travail, Georgette Agutte a peint sur du fibrociment, support jusqu’alors inédit, 2 tableaux extraordinaires de raffinement, d’élégance et de justesse dans la composition et le traité de corps de femmes, joueuses ou lutteuses, aux courbures sensuelles, qui ne sont pas sans évoquer certaines fresques gréco-romaines, « peintures sèches » sur du plâtre. Plus tard, Miro et Picasso utiliseront ce support en fibrociment pour peindre quelques unes de leurs oeuvres.
Toute la vie de Georgette Agutte fut animée par la passion : la passion de la peinture, de la sculpture, la passion amoureuse… à tel point qu’elle ne survrira que quelques heures à l’amour de sa vie, Marcel Sembat, en laissant un billet qui dit en substance : « Minuit, voilà 12 heures qu’il est parti. Je suis en retard ».
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Le saviez-vous ?
* L’Ecole Nationale des Beaux Arts ne s’ouvre aux femmes qu’en 1897, Georgette Agutte sera l’une des premières à y être admise avec Suzanne Valadon, Jacqueline Marval et Emilie Charmy.
* Georgette Agutte a épousé en seconde noce l’homme politique Marcel Sembat, bien connu, avec Léon Blum, comme étant l’une des figures les plus illustres de la S F I O (Section Française de l’Internationale Ouvrière). Il fut aussi avocat, journaliste, amateur d’art éclairé et de surcroît mécène.
* Cette exposition a pu avoir lieu grâce, entr’autres, à l’association A S I H I (Agutte-Sembat Institut Humaniste et Impressionniste), dont la devise a été empruntée à André Malraux : « La Culture ne s’hérite pas, elle se conquière ».
* * Musée de l’Hôtel-Dieu, 1 rue Thiers à Mantes-La-Jolie, 01 34 78 86 60 jusqu’au 30 septembre 2012. Une expositon à ne pas rater !
A une demi-heure de la gare Saint-Lazare, jusqu’au 30 septembre 2012
Lydie Léa Chaize, avril 2012